J’aime cette parole de Jean de la Croix : « Le Père éternel a dit une seule parole : c’est Son Fils. Il l’a dit éternellement dans un éternel silence. C’est dans le silence de l’âme qu’elle se fait entendre. » (1)
Combien cette sentence me parle et fait écho dans mon être intérieur. Cette Parole, qu’est le Fils, est l’objet de ma méditation et de ma contemplation. Bibliquement nous ne pouvons séparer le concept de Fils du concept de Christ.
Ce Fils, Christ, est à la fois le messager et le message, ce que le Père nous a dit et continue de nous dire. Qu’avons-nous besoin de plus que d’écouter cette Parole ?
Ce Fils, Jésus, est l’homme selon Dieu, le prototype de la nouvelle création, celui à l’image duquel nous sommes transformés de gloire en gloire par l’Esprit. (2)
Christ, c’est la Parole qui s’est faite chair en Jésus, lui donnant cette qualité de Fils et qui continue de s’incarner en nous et nous rend aussi fils de Dieu,
Jean de la Croix, encore lui, dans son ouvrage « La Montée du Carmel » détaille cette parole du Père de manière sublime. Je lui laisse la parole.
Dès lors qu’il nous a donné son Fils, qui est sa Parole, il n’a pas d’autre parole à nous donner. Il nous a tout dit à la fois et d’un seul coup en cette seule Parole ; il n’a donc plus à nous parler…
Voilà pourquoi celui qui voudrait maintenant l’interroger, ou désirerait une vision ou une révélation, non seulement ferait une folie, mais ferait injure à Dieu, en ne jetant pas les yeux uniquement sur le Christ … Dieu pourrait en effet lui répondre de la sorte:
Je vous ai dit tout ce que j’avais à dire, par la Parole qui est mon Fils. Fixez les yeux sur lui seul, car en lui j’ai tout établi, en lui j’ai tout dit, tout révélé, et vous trouverez là bien plus que tout ce que vous désirez et demandez.
Depuis le jour où je descendis sur lui, avec mon Esprit, au mont Thabor, en disant : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis tout mon plaisir : écoutez-le (Matth 17,5), j’ai cessé toutes mes anciennes pratiques d’enseignement, de réponses, et je lui ai confié cette mission. Si j’ai parlé avant cette heure, c’était pour vous promettre le Christ, et si on m’adressait des demandes, elles s’harmonisaient avec la recherche et l’espérance du Christ. Tout bien devait se concentrer en lui, comme le proclame maintenant la doctrine exposée par les Évangélistes et les Apôtres.
C’est pourquoi, qui m’interrogerait, à présent, de même et voudrait que je lui réponde ou que je lui révèle quelque chose, ce serait, en quelque sorte, me demander de nouveau le Christ, et plus de foi que je n’en ai donné. Ce serait manquer de foi dans le Christ, puisque cette foi a été donnée en lui ; c’est même faire injure à mon Fils bien-aimé, puisque ce manque de foi en lui équivaut en quelque sorte à lui demander une seconde incarnation, afin qu’il recommence sa vie et sa mort.
Tu n’as plus rien à me demander, ni à désirer des révélations ou visions de ma part. Regarde-le bien, tu trouveras tout cela déjà fait et donné en lui, et infiniment plus.
Si tu veux que je te dise quelque mot de consolation, regarde mon Fils, qui m’est si obéissant et soumis pour mon amour et qui est affligé, et tu verras tout ce qu’il te répondra.
Si tu veux que je t’explique des choses cachées ou des événements, jette seulement les yeux sur lui et tu y trouveras des mystères très cachés et la sagesse et les merveilles de Dieu qui sont encloses en lui, selon ce que dit mon Apôtre : En ce Fils de Dieu, sont cachés tous les trésors de la sagesse et science de Dieu (Col 2,3). Ces trésors de la sagesse seront pour toi beaucoup plus sublimes, plus savoureux et plus utiles que ce que tu veux savoir.
Car pour cela le même Apôtre se glorifiait, disant qu’il ne savait autre chose que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié (1Cor 2,2).
Et si tu veux encore d’autres visions et révélations divines ou corporelles, regarde-le aussi en son humanité, et tu y trouveras plus que tu ne penses, parce que l’Apôtre dit aussi : Dans le Christ demeure corporellement toute la plénitude de la divinité (Col 2,9). (3)
Je propose aussi des variantes intéressantes de parties de ce texte qui apportent des reliefs inspirants.
... qui pourrait lui dire : Celui- ci est mon Fils bien-aimé, en qui je me plais uniquement ; écoutez-le (Matth., 17, 5)…
…Jetez les yeux sur lui seul, entrez dans son intérieur, et vous découvrirez tous les trésors de ma sagesse et de ma science qu’ il cache en lui- même ( Coloss., 2, 2-3)…
…Contemplez-le revêtu de votre chair, et vous y verrez plus que vous ne pouvez comprendre, puisque toute la plénitude de la Divinité habite en lui corporellement… (4)
Je finis cet article comme je l’ai commencé.
Le Père éternel a dit une seule parole : c’est Son Fils. Il l’a dit éternellement dans un éternel silence. C’est dans le silence de l’âme qu’elle se fait entendre.
Une suite très bientôt …
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(1) Saint Jean de la Croix, Maxime 147.
(2) 2de Épître de Paul aux Corinthiens, 3, 18 ; Épître de Paul aux Romains, 8, 29
(3) Saint Jean de la Croix, La montée du Carmel, livre II, Chapitre 22.
(4) Traduction par l’abbé Jean Maillart, jésuite
Merci beaucoup en Christ sont toutes les réalités spirituelles
Salut Patrick,
C’est comme si le seul moyen de « saisir » Dieu était de le voir comme un père. Et c’est comme si le seul moyen de le voir comme un père était de se voir comme un fils. Et se voir comme un fils est possible grâce à l’appel intérieur que Dieu place en nous depuis tous temps…
Et si Dieu est au-delà du père, le Fils peut-il y voir Dieu comme sa mère? La mère n’engendre t’elle pas elle aussi finalement?
L’incarnation écarte vraiment les frontières du Royaume, de notre identité et de notre conception de Dieu.
Merci pour tes partages.
Pas faux
Si Christ est liage de Dieu et qu’en lui il n’y a ni homme ni femme
alors nous ne devons pas réduire le Père à un modèle masculin mais plutôt comme la source d’où nous tenons notre origine.
Bonjour Patrick,
À ma première lecture de ton article, je réalise que je dois voir Jésus là où il est déjà dans ma vie.
Ne plus Lui demander de se manifester, de se révéler car en fait, IL l’est déjà. Rien que ça, ça me fait faire « un tour de moi même » (une métanoïa) et j’en arrive à Le reconnaître où IL est déjà.
Une nouvelle façon de vivre voit le jour pour moi mais aussitôt je ne Le remarque presque plus jusqu’à plus du tout.
Dans mon tourment, mon âme bavarde n’a plus que des: « Viens! Révèle Toi! Montre Toi! » (tout comme elle pourrait dire « Ouvre! Laisse toi trouver! Donne! »
Mais Dieu prend ça comme une injure.
Alors je réessaie de Le regarder là où Je L’avais trouvé et de nouveau, je ne Le vois plus!
Le questionner, Lui demander de l’aide, Lui demander de Se manifester, est-ce une injure? Je crois comprendre dans ton article que oui mais pourquoi dit-IL: « demandez et vous recevrez? »
le but de cet article est que nos yeux s’ouvre à la réalité de sa présence dans notre vie. Si nos yeux ne sont pas encore ouverts, les prières: révèle-toi, montre-moi ta face ne sont pas des injures, mais juste les « cris » d’une âme assoiffée dont les yeux ne sont pas ouverts. Dieu entends les cris, il pourvoit à notre besoin, mais pas toujours de la façon dont on l’attends.
Toutes les Paroles que Jésus a dites venaient de son Père : Jean 17:8 Car je leur ai donné les paroles que tu m’as données ; et ils les ont reçues, et ils ont vraiment connu que je suis sorti de toi, et ils ont cru que tu m’as envoyé. ça en fait un paquet de paroles!