Son nom est Râbi’a al-Adawiyya
Elle est née vers 715 à Bassorah (Irak) et décédée dans cette même ville en 801. Elle a sa sépulture sur le Mont des Oliviers. Râbi’a est une mystique et une poétesse musulmane. Considérée comme une des grandes saintes de l’Islam, elle est une figure majeure du soufisme. Râbi’a n’a pas laissé d’écrits. Ce que l’on connaît d’elle consiste essentiellement en des fragments, que l’on trouve notamment dans des recueils de vies de soufis, comme le célèbre « Mémorial des saints » de Farid al-Din Attar. Râbi’a semble avoir surtout célébré l’amour (maḥabba) et l’intimité (‘uns) de Dieu.
Voici une histoire qui donne tout son sens à l’illustration de cet article. Cette femme brûlait d’amour pour Dieu. Son message est l’amour intégral, l’amour pur. Un jour elle sortit avec une torche allumée dans une main et une cruche remplie d’eau dans l’autre. On lui demanda:
– Que veux-tu faire de cela ?
– Je veux, avec le feu, brûler le paradis et, avec l’eau, éteindre l’enfer, de façon qu’il n’y en eût plus jamais.
– Pourquoi veux-tu faire cela?
– Parce que je veux que personne ne fasse jamais le bien pour avoir la récompense du paradis, ni par peur de l’enfer, mais précisément pour l’amour de Dieu, qui vaut tant, et qui peut nous faire tout le bien possible. Je veux que le paradis et l’enfer disparaissent et que les hommes regardent Dieu sans espérance ni crainte.
Cette même pensée se retrouve dans sa prière :
« Mon Dieu, si je t’adore par crainte de ton Enfer, brûle-moi dans ses flammes ! Si je t’adore par convoitise de ton Paradis, prive m’en ! Je ne t’adore que pour Toi car tu mérites l’adoration. Alors ne me refuse pas la contemplation de ta Face impérissable ! »
Dans sa jeunesse, le moment était venu pour elle d’effectuer le pèlerinage à la Mecque. Râbi’a était impatiente de voir la Ka’ba, mais au milieu du chemin, en plein désert, elle s’écria: « Mon Dieu, mon coeur est en proie à la perplexité au milieu de cette solitude. Je ne suis qu’une brique non cuite. J’ai besoin pour passer à la cuisson et devenir meilleure, d’autre chose que la Ka’ba qui n’est qu’une pierre. Ce qu’il me faut, c’est la contemplation de ta Face ! » Elle entendit un appel : « Si je devais me manifester à l’univers tel que je suis, tout volerait en éclats… » ; quand elle reprit ses esprits l’image de la Ka’ba était devant elle. Elle venait l’accueillir. Râbi’a dit: « Ce qu’il me faut, c’est le maître de la Ka’ba. Que n’ai-je à faire de la Ka’ba? Mon seul désir est de rencontrer Celui qui a dit: « Quiconque s’approchera de moi d’un pas, je m’approcherai de lui d’une coudée ! »
Sa vision de la vie
À la sortie de la mosquée de Basra, un groupe de jeunes se dirigea vers cette vieille femme qui ne cessait de crier son amour pour son créateur pour lui poser des questions :
– D’où viens-tu ?
– De l’autre monde !
– Et où vas-tu?
– Vers l’autre monde.
– Et que fais-tu dans ce monde ?
– Je ne me pose pas la question mais j’accomplis ma mission !
– Et de quelle façon tu l’accomplis ?
– J’utilise ce qui est à ma disposition dans ce monde pour construire dans l’autre monde !
– Toi qui excelles dans la parole, es-tu habile à préserver le coeur ?
– Je préserve mon coeur de tout. De ce qui est en moi, je n’ai rien laissé sortir ! Et de ce qui est en dehors de moi, je n’ai rien laissé entrer ! »
Sa vision de la mort
La mort n’était pas pour elle une source d’angoisse et de désarroi, une chose affreuse, au contraire. Dans ses états de Lumière, elle rencontra l’ange de la mort et lui dit:
– Qui es-tu?
– Je suis le démolisseur des délices, celui qui laisse derrière lui les veuves et les orphelins !
– Pourquoi te présentes-tu sous tes aspects les plus cruels? Ne pouvais-tu pas dire: Je suis celui qui unit l’Aimé à l’amant?
La mort était pour elle un pont qu’elle devait emprunter pour rejoindre son Bien-aimé, le Tout-Puissant.
Je finirai (par ce qu’il faut bien finir mais j’ai conscience de n’avoir présenté qu’un court extrait de sa vie) par cette parole merveilleuse de Râbi’a. « J’ai cessé d’exister et j’ai quitté ma propre personne. Je suis devenue une avec Dieu et suis tout à fait Sienne ».
Il y a matière à méditer.
Stay tuned…