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Petites lectures inspirantes sur l’enseignement que l’on reçoit de l’intérieur.

Les premières viennent du christianisme, d’Augustin d’Hippone (354-430) et de Grégoire le Grand (540-604), puis la suivante vient du soufisme, de Djalâl-ad-Dîn Rûmî (1207-1273), plus connu sous le nom de Rumi.

Saint Augustin
De Magistro
 – Chap. I
Tu ne sais donc pas que qu’il nous est commandé de prier après avoir fermé les portes de notre chambre, c’est-à-dire le sanctuaire de notre âme… on doit chercher et prier Dieu dans les profondeurs mêmes de l’âme raisonnable, c’est-à-dire de l’homme intérieur : c’est en effet ce que Dieu appelle son temple. N’as-tu point lu dans l’Apôtre « Ignorez-vous que vous êtes le temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? Le « Christ habite dans l’homme intérieur ». N’as-tu point remarqué non plus ce passage du Prophète : « Entretenez-vous dans vos cœurs et offrez un sacrifice de justice, et confiez-vous au Seigneur ? » Et où penses-tu que j’offre le sacrifice de justice, sinon dans le temple de l’âme et dans le sanctuaire du cœur ? Or le lieu du sacrifice doit être le lieu de la prière.
De Magistro – Chap. XII
… celui qui nous écoute voit clairement dans son âme ce que nous voyons nous-mêmes; ce ne sont pas nos paroles qui l’instruisent, c’est le pur regard de sa contemplation. Je ne l’enseigne pas lorsque j’énonce la vérité qu’il voit; mes paroles ne lui apprennent rien. … elles lui adressent des questions proportionnées à son aptitude de recevoir l’enseignement intérieur

Saint Augustin
Commentaire sur la I° Epître de saint Jean, tr. IV, ch. II, P.L. t. XXXV,
 » Quant à vous, vous possédez une onction reçue du Saint Esprit… L’onction que vous avez reçue de lui demeure en vous et vous n’avez pas besoin que quelqu’un vous enseigne, car son onction vous enseigne tout  » (I Jean, II, 20 et 27).
Que faisons-nous donc, frères, quand nous vous enseignons ? Si son onction vous enseigne toutes choses, alors nous travaillons pour rien ? Et pourquoi tant crier ? Il n’y a qu’à vous abandonner à son onction, et cette onction vous enseignera. […]
Car vous voyez là, mes frères, un grand mystère. Le son de nos paroles frappe les oreilles ; le maître est à l’intérieur.
Ne croyez pas qu’un homme puisse apprendre quelque chose d’un autre homme. Nous pouvons vous avertir en faisant du vacarme avec notre voix ; s’il n’y a pas à l’intérieur quelqu’un pour vous instruire, c’est en vain que nous faisons du bruit.
Alors, frères, vous voulez vraiment savoir ? N’avez-vous pas tous entendu ce sermon ? Combien sortiront d’ici sans avoir rien appris ?
En ce qui me concerne, je me suis adressé à tous, mais ceux à qui cette onction ne parle pas à l’intérieur, ceux que l’Esprit Saint n’instruit pas de l’intérieur, ils reviennent chez eux sans avoir rien appris. L’enseignement de l’extérieur, c’est en quelque sorte une aide ou des avertissements ; il a sa chaire dans le ciel celui qui instruit les cœurs. C’est pourquoi il dit lui-même dans l’Évangile : « Ne vous faites pas appeler maître sur la terre. Un seul est votre maître, le Christ » (Mt 23, 8.10).
Qu’il vous parle donc lui-même à l’intérieur, puisque aucun homme ne s’y trouve, car même si quelqu’un se trouve à ton côté, il n’y a personne dans ton cœur ? Que dis-je ! Que ton cœur ne soit pas vide de toute Présence ! Que le Christ soit dans ton cœur ! Que son onction soit dans ton cœur, afin que ce cœur altéré ne soit pas dans la solitude et privé des sources où il peut se désaltérer.
Il est donc à l’intérieur, le maître qui enseigne ; c’est le Christ qui enseigne ; c’est son inspiration qui enseigne. Là où il n’y a ni son inspiration ni son onction, nous faisons retentir en vain nos paroles à l’extérieur. Telles sont ces paroles, frères, les paroles que nous faisons retentir à l’extérieur ; elles sont comme les soins du cultivateur pour un arbre. L’homme travaille à l’extérieur : il donne de l’eau et apporte tout son zèle à la culture. Quels que soient les soins qu’il donne à l’extérieur, est-ce lui qui forme les fruits ? Est-ce lui qui revêt la nudité des branches avec l’ombre des feuilles ? Accomplit-il quelque chose de tel à l’intérieur ?
Qu’est-ce qui fait tout cela ? Écoutez un jardinier, l’apôtre Paul voyez ce que nous sommes, apprenez que nous avons un maître au dedans de nous « J’ai planté, Apollos a arrosé, mais c’est Dieu qui a donné l’accroissement. Celui qui plante n’est rien, non plus que celui qui arrose, mais c’est Dieu qui donne l’accroissement. » Nous vous parlons donc, et soit que nous plantions en parlant, soit que nous arrosions, nous ne sommes rien ; Dieu, qui donne l’accroissement, c’est-à-dire, son onction, qui nous enseigne toutes choses, est tout.

Saint Augustin
Lettre 266

Tiens pour absolument certain que même quand tu pourras apprendre quelque chose par mon intermédiaire et d’une manière salutaire, ton Maître véritable sera toujours le Maître intérieur de l’homme intérieur.

Saint Grégoire le Grand
Homélies sur l’Evangile. 30. 3

Si L’Esprit ne parle pas au-dedans, c’est en vain que travaille au-dehors la langue du prédicateur.

Djalâl–ad-Dîn Rûmî
Fîhi-Mâ-Fîhi (Le Livre du Dedans)
Nous espérons de Dieu, que vous aussi vous entendrez par votre oreille intérieure ces propos. Là est le profit. Car mille voleurs venus de l’extérieur n’arrivent pas à ouvrir la porte si à l’intérieur ne se trouve un complice qui l’ouvre. Dix mille paroles de l’extérieur, si elles ne sont confirmées de l’intérieur, sont inutiles. Tel l’arbre qui n’a pas d’humidité dans sa racine: mille torrents d’eau ne lui serviraient à rien. Il faut d’abord qu’il y ait dans sa racine une certaine humidité, et ensuite l’eau peut le secourir. (Le Livre du Dedans. 12)

S’il est important pour un certain nombre de personnes d’être guidées par un maître spirituel ou un conducteur, il faut toujours garder à l’esprit que le véritable maître est en nous. Sans quoi le maître extérieur ou le conducteur n’est qu’illusion.